5. Personnes sans papiers, personnes détenues

Apparue en Chine fin 2019, l’épidémie de COVID-19 a balayé le monde à une vitesse étonnante, obligeant les États européens à mettre en œuvre la plus vaste intervention sociétale d’urgence depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale: le confinement de leur population.

Maintenant que le choc initial et l’incrédulité sont passés, il est nécessaire de réfléchir à ce choix et à ses conséquences.

En effet, les politiques publiques ne sont pas seulement fondées sur la «science» et sur des données factuelles. Elles reposent également sur nos choix de priorités, qui découlent de l’importance que nous accordons explicitement ou implicitement à différentes valeurs et à différents enjeux. Dès lors, pour éviter le «somnambulisme» dans l’élaboration des politiques, nous devons considérer les conséquences du confinement, de nos politiques de sortie du confinement, et des changements sociétaux à long terme résultant de ces politiques, dans tous les domaines du social, du psychologique, de l’éthique, du politique, et pas seulement de l’économique et du médical. Pour ce qui est de l’avenir, il est impératif de prendre en compte tous les aspects de la société humaine lorsqu’il s’agit d’organiser la sortie du confinement ainsi que la période post-confinement.

Plus d’une centaine de chercheurs et chercheuses ont participé à cette réflexion. C’est à partir de celle-ci qu’au-delà des considérations générales (reconquérir le temps; appréhender la complexité, la société du flux; mettre l’économie au service de l’humain; développer un management humain; co-construire un futur désirable pour les jeunes et les générations futures; créer de nouvelles sociabilités; réfléchir aux bons usages des nouvelles technologies), nous proposons 13 recommandations sur le long terme pour une sortie sociale et humaine de ce confinement.

5. Personnes sans papiers, personnes détenues

Diverses populations font l’objet d’une politique d’exclusion et de répression plutôt que d’une politique d’inclusion. Les personnes sans papiers, déjà fragilisées en temps normal, se retrouvent parmi les plus vulnérables face à la crise du COVID-19. Les personnes en attente de jugement ou condamnées qui se trouvent en prison voient également leur situation aggravée par cette crise.

Personnes sans papiers: nous recommandons que les personnes sans papiers établies sur le territoire belge soient régularisées plutôt que criminalisées, qu’elles aient accès au marché du travail et bénéficient des droits fondamentaux reconnus aux citoyens.

Personnes détenues: nous recommandons que les alternatives à la détention préventive soient privilégiées et que les personnes condamnées fassent prioritairement l’objet de peines alternatives à l’emprisonnement et à la peine de surveillance électronique, dont le confinement montre le caractère inhumain.

Nous recommandons que le transfert de la compétence des soins de santé en prison vers le SPF Santé publique et le SPF Sécurité sociale soit réalisé pour assurer une meilleure prise en charge psycho-médico-sociale des personnes détenues, une équivalence entre les droits aux soins dans et hors de la prison, ainsi qu’une continuité de soins avant, pendant et après une incarcération.

Carta Academica

13 mai 2020